Ganagobie  :

A l'origine Ganagobie est un plateau qui a à peu près 600 mètres de hauteur, qui s'est formé il y a 25 millions d'années dans le bassin de Forcalquier qui était alors recouvert par la mer. Il est apparemment plat mais en fait le terrain qui le constitue est en pente (dénivellation de 80 mètres ). Ses premiers habitants apparaissent à l'âge de bronze. Et des fouilles récentes font penser à une occupation permanente dès le VI ème siècle ; les textes, eux, n'en parle que dès le VII ème. 

 

   
 

Selon une légende provençale, son nom viendrait de «  cana gobi  », chienne boiteuse, qui en aurait un jour son refuge. D'autres disent que l'appellation tirerait son origine de «  Tanagobie  » qui en Celte signifie « chêne », nom qui témoignerait de la riche présence de cet arbre. Pour le moment, il est impossible de donner une explication plausible. Selon l'abbé Feraud, son nom latin fut «  podium ganagobiae  » mais les Romains ne s'y implantèrent pas, ils se contentèrent de rester au bas et de faire passer la « via Domitia » à ses pieds.

Le plateau de Ganagobie peut-être grossièrement divisé en deux parties :

- le monastère

- un village nommé : « Villevielle »

--- Vue sur Peyruis

   

Le monastère daterait de l'époque carolingienne et du X ème siècle comme semble l'indiquer une trentaine de tombes dont celle d'un abbé qui avait été enterré avec les insignes de son autorité, d'ailleurs ce monastère est cité dans une bulle papale de 939. On retrouve traces d'une communauté religieuse au XI ème siècle. L'évêque de Sisteron, Jean II, qui devait être un seigneur local y fit édifier une église, dédiée à Notre Dame et en est considéré comme le fondateur. Elle appartint en premier à l'abbaye de Cluny ; le dernier comte de Forcalquier, Guilhem II, lui donna la seigneurie du lieu et de ses environs plus celle de Sigonce. Les restes de St. Honorat y furent transportés car les îles de Lérins qui conservaient le corps du fondateur de leur monastère n'étaient pas sûres, une chapelle de l'église porte le nom du saint pour rappeler l'événement. Ils y restèrent jusqu'en 1391, ce qui donna naissance à la légende de St. Transit, le saint qui n'existait pas, nom qui viendrait d'une erreur de transcription d'un moine copiste, en latin transitus = passage, passage des restes du Saint.

 

Mais au XIV ème siècle devant la décadence de l'ordre de Cluny, le monastère périclita lui aussi et il faudra attendre le XVI ème siècle avec le prieur Pierre de Glandevès pour assister à un renouveau. La révolution et sa vente comme bien national en firent une ruine (1791) qui fut rachetée en 1883 par le marquis de Malijay, lequel en 1891 laissa le bien aux bénédictins de Sainte Madeleine de Marseille, puis ce sont les bénédictins de Haute Combe (Savoie) qui vont s'occuper du prieuré et y entretenir une présence symbolique (un moine ou deux). On dit, même, qu'un des moines reçut la confession de Gaston Dominici. En 1992, le prieuré se verra restaurer pour leur permettre de venir se retirer dans un endroit plus calme que le monastère de Savoie qui devenait un lieu trop touristique. Cette restauration se fit sur des bâtiments du XII ème siècle.

 

   

Il possède un musée lapidaire et une bibliothèque impressionnante puisqu'elle compte plus de 100.000 ouvrages dont des manuscrits et des incunables répartis sur à peu près 5 kms, très bien conservés grâce à la température constante créée par les rayonnages établis dans la roche du plateau (les manuscrits ont été microfilmés et sont visibles à la BNF ). Aujourd'hui les moines vendent le produit de leur travail sur place dans une boutique qui a été aménagée un peu plus loin que le cloître (vente de baumes, miels etc.).

L'église du monastère que l'on voit aujourd'hui date du XII° s. et constitue un exemple type du roman provençal. Cette église contiguë au cloître est connue pour son tympan qui représente le Christ dans toute sa gloire, il est sulpté au sommet d'une porte entourée de festons en qui on pourrait voir une origine décorative arabe. Ce Christ a aussi une figure que l'on retrouve fréquemment sur tout ce qui d'origine clunisienne.

 

   

A l'intérieur, on peut voir une tribune très élevée, construite au XVII° s. sur les restes d'une autre, en son fond, on devine les restes d'un autel dédié à St. Transit, où l'on déposait les enfants malades pour les guérir.

On a découvert, en 1898, des mosaïques du Moyen-âge, que l'on date entre 1122 et 1129, dans lesquelles on peut sentir une influence orientale et romaine. Elles représentent des animaux réels, d'autres fantastiques, des motifs géométriques pouvant avoir été inspiré par le style byzantin et St. Georges terrassant le dragon.

Des fouilles de 1974 permirent de mettre à jour des fragments de vitraux (XII° s.) qui seraient les plus anciens de Provence. Il y en avait à peu près trois cents. Depuis 2006, un moine coréen, dominicain, Kim En Joong les refait en leur donnant des motifs non figuratifs.

Maintenant voyons le village de Villevieille ; il occupe la partis terminale du plateau, presque à l'opposé du monastère et tout à fait à l'opposé de la route d'accès, n'oublions pas que cette route goudronnée donnant accès au plateau et partant du bas c'est-à-dire de la N. 96 ne fut construite qu'en 1953 avant celui qui voulait aller en haut n'avait que ses pieds ou le dos d'un mulet à sa disposition pour suivre un chemin pierreux. C'est une agglomération sur l'éperon nord qui date du Haut Moyen Age. Elle a un rempart de 120 mètres de long qui la protège du coté du plateau, les autres sont bordés par des falaises. Il n'en reste de nos jours que des tas de pierres au milieu desquels on peut deviner église qui aurait été bâtie au XI° s., dédiée à St. Jean Baptiste.

A mi chemin entre Villevielle et le monastère se trouve la chapelle Saint Martin qui n'a rien d'extraordinaire à révéler mais qui pourrait avoir été un ermitage, la belle végétation qui l'entoure invite à la méditation, c'est un lieu de pensée.

Et en dernier commentaire, il faut dire que le lieu servit pendant la Seconde Guerre Mondiale ou tout du moins les grottes préhistoriques qui parsèment le plateau, d'endroit de cache pour les résistants.

 

   

Ma mère qui à l'époque était une employée de la mairie de Forcalquier m'a raconté que les Allemands voulurent investir les

lieux et que pour les retarder un enfant leur déversa dessus une caisse de grenades, il eut la vie sauve, après avoir été capturé, vu son courage, l'officier allemand commandant les troupes, le laissa indemne…

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L'auteur du site : Jean-Paul Audibert